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le café bu à petites gorgées. Nous nous recroquevillons, telles les hirondelles dans leur
nid avant de s’offrir au vent. Petites phrases. J’écoute la chanson de sa voix. « Tu
rêves ? » Sa main secoue la mienne. Parce que tu ne rêves pas ? Tu ne m’écoutais pas !
Si, si, si ! Est-ce ma faute si je suis sensible à ta voix ? J’aime ses inflexions, j’aime
quand elle se fait rauque, profonde. J’aime quand elle monte, pure et nue, souple,
chaude. J’aime quand elle se change en un chuchotis chatouilleux ou en un amoureux
murmure. Car tu es amoureuse ? Autant que moi, dans ma chemise froissée de
gandin ?
Lui, l’agent immobilier (celui du roman La Maison Bastet), elle, la décoratrice
d’intérieur. Les rendez-vous qui se rapprochent et les cœurs qui se resserrent (à moins
que ce ne soit l’inverse.) La sensualité est toujours délicate et distinguée. Ils jouent,
joue contre joue, de décors en corps à corps. En accord majeur.
Dans ce récit immobilier mais pas immobile, Christophe Blanquie met de la poésie là
où l’on ne l’attend pas : au coin des bois et des prairies, dans le lieu magique de SaintEutrope, au coin d’une cheminée, dans la ville que l’on achète et que l’on vend (sauf
l’été.)
Lecteur et écrivain, Christophe Blanquie aime tout particulièrement les histoires dont
ses personnages choisissent le dénouement. Romans ou nouvelles, il aime jouer avec
des styles différents. À Saint-Eutrope, les amants est son quatrième recueil aux
Editions Non 31.
Illustration de couverture : Laurits Andersen Ring, Paysage de printemps... (1888),
détail.